Prendre en compte l’impossible - Sylvie Poinas

n°60

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les ateliers du ri3

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danielroy@wanadoo.fr ; herve.damase@orange.fr

Modérateur : Jean-Robert Rabanel

Prendre en compte l’impossible

Sylvie Poinas

En mai 2010, pour une seconde année, a eu lieu à l’Institut Universitaire de Formation des Maitres de Clermont-Ferrand un stage dans le cadre de la formation continue à l’adresse du personnel de l’éducation nationale. Intitulé « La scolarisation des enfants et adolescents porteurs de troubles autistiques », il réunissait des enseignants en Réseau d’Aides Spécialisées pour élèves en difficulté, des Conseillers d’orientation psychologues, des enseignants en classes d’inclusion scolaire, des enseignant référents. Ce stage qui se tenait durant toute une semaine était organisé dans un souci d’ouverture vers plusieurs discours, chaque professionnel parlant à partir de sa pratique et de ce qui la fonde.

Parmi les invités, sont intervenus successivement (sur deux jours) trois collègues du ctr de Nonette : Jean-Robert Rabanel, responsable thérapeutique, Jean-Pierre Rouillon, directeur, et Marie-Ange Ducloix, enseignante spécialisée. Dans un style qui lui est propre, chacun a pu faire valoir l’expérience qui est la sienne auprès des sujets psychotiques qui a priori objectent à tout projet éducatif. L’assistance a été des plus attentive pour accueillir les perles issues de la pratique. Souvent démunis face à la présence d’un sujet psychotique, chaque professionnel a été sensible à une approche au cas par cas, faisant valoir la dimension inventive de chaque sujet.

Certains points abordés lors de ces journées ont spécialement suscité l’intérêt, notamment lorsque le J.-R. Rabanel a souligné l’importance, pour chacun, de pouvoir remettre en question l’idéal éducatif lorsque l’on intervient auprès de sujets autistes ou psychotiques ; ce qui est également le cas pour les parents. Ce passage de l’impuissance à l’impossible est certes parfois douloureux, surtout quand on est formé pour transmettre un savoir établi, mais il s’avère aussi très productif quand il concerne des sujets qui ont refusés d’entrer dans la norme commune. Dès lors, le professionnel s’ouvre de nouvelles perspectives en étant sensible aux trouvailles de chacun.

Vouloir éduquer, même si c’est impossible comme nous l’apprend Sigmund Freud, cela n’empêche pas de considérer que nous avons affaire à des sujets pris dans le langage, et auxquels nous nous devons de nous adresser. L’éducation dépend aussi de l’idée que l’on se fait de l’homme !

Au CTR de Nonette, une attention particulière est portée à la façon dont chacun s’inscrit dans une temporalité qui lui est propre, chacun ayant sa façon de faire avec le savoir de l’école ; pas de pour tous, mais une déclinaison qui va jusqu’à prendre en compte le passage pour franchir le pas de la porte de la classe. Ceci apparaît comme une réelle difficulté à l’école du quartier. En présence d’un sujet autiste, tout devient plutôt énigmatique ; ce que l’on fait avec l’un, on ne peut le faire avec l’autre.

Un des intervenants, professeur d’éducation physique, a témoigné de sa pratique et surtout de sa recherche auprès de jeunes qui le mettent au travail dans le cadre d’une Unité Pédagogique d’Intégration (upi). Il a ainsi pu adresser quelques questions essentielles : Peut-on vraiment parler de handicap quand il s’agit de différence ? Comment leur faire aborder la culture de l’EPS en tant que professeur attentif à l’altérité des positions ?

Ce n’est rien de moins qu’à un changement de perspective que nous sommes ici conviés, l’enseignant s’engageant dans une recherche pour garder sa spécificité professionnelle tout en construisant une approche avec chacun de ses élèves.